lundi 26 février 2007

Riopelle vue par Roseline Granet… l'art québécois

Je ne connais que très peu Riopelle et j'avoue ne guère vouloir pour l'heure proposer un commentaire exhaustif de son travail.

Il me brûle de vous en parler, avec simplicité, à la manière dont il m'a été donné de le découvrir ; par un pur et délicieux hasard. D'ailleurs, ce n'est pas lui comme artiste, que je découvris, mais la perception singulière, traduite artistiquement, de lui, par Roseline Granet, sur laquelle je tombai nez à nez.

C'est au troisième étage, en direction de la tourelle du Musée des Beaux-arts, si ma mémoire - qui aime à me taquiner - ne me joue pas encore des tours, que je le rencontrai… comme l'on croise dans le vertige des songes, en certains lieux fantasques, des êtres surnaturels…

Voici Le grand fauteuil - une sculpture en bronze -, installée là devant le regard des passants, leurs discussions intelligentes, coup de cœur, écoeurement, au sujet d'œuvres vues lors de leur visite ; confiné dans un étroit espace, entre trois murs et des marches, presque un petit intérieur de maison, en tout cas dans une absolue intimité. Un hibou de bronze au mur, aux allures de totem rappelle qu'il s'agit bien de l'environnement de l'artiste, son univers.

Je circulais autour de l'œuvre, m'approchais, reculais, et me fascinais de la présence fulgurante de cet amas de bronze. Alangui dans son siège, fondu dedans littéralement, un homme, ne faisant presque plus qu'un avec. Le traitement du bronze, créait l'illusion que ce dernier était en processus de fonte, donnant dynamisme, et histoire, à cette masse rigide.

Le tour de force accompli par l'artiste réside éminemment dans sa capacité à rendre fluide, érodé, ce bloc d'airain.

On s'imaginerait, en regardant cette œuvre, « un homme à la nonchalance provocante, trop familière, voire beaucoup trop sans-gêne d'ailleurs, pour avoir une place quelconque au Musée. »

On pourrait y percevoir un ivrogne braillant, et demandant qu'on lui serve un énième verre ; un pitoyable saoulé. Sans doute, un de ces artistes au talent pour jamais dénigré, un «maudit».

Je le pensai un instant mort, il serait de ceux qui mourraient dans un bus voire dans un musée - peu importe le lieu - sans que personne n'y attache d'importance, un déclassé… la sculpture est tant emprunte de mélancolie, qu'elle me paraît être l'évocation même du pathétisme de notre existence. De la décrépitude inhérente à notre statue de vivant, donc de mourant… elle met en scène notre attente résignée sur terre d'une mort chronique ;la décomposition humaine semble avoir été figée un instant dans le bronze, tout en menaçant, de son imminente achèvement. Et soudainement, ce bougre sur son siège ne serait plus que poussière, retournant à la poussière.

Enfin, cette emphase spleenétique évidente de l'œuvre n'a d'égale que sa force poétique. Celle-ci parle à son spectateur et l'interroge sur lui-même ; sa taille presque humaine, une ressemblance certaine du personnage sur son siège avec Riopelle, la manière singulière dont il occupe l'espace du musée, crée un sentiment de proximité, d'identification avec le visiteur. Ainsi, l'anthropomorphisme compose avec la capacité qu'a la sculpture de nous narrer une petite histoire, pour peu qu'on s'attarde un instant et qu'on l'observe… et la matière accéder à la vie et nous la faire partager, un temps, celui d'une pause rêveuse…

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Lire le blog en entier, pretty good